La puissance est un état éphémère de la condition humaine. En situation de puissance, est-ce par manque de discernement, d'empathie, de temps (!), d'amour, excès d'ego ou de mépris que nous renvoyons paitre consciemment ou le plus souvent inconsciemment ceux qui nous paraissent si petits ?
Récemment et de temps en temps - cela vous arrive-t-il parfois - je ressens certains puissants à qui je m'adresse, distiller ce mépris lointain de celui qui n'a pas besoin de moi. Artisan depuis 10 ans, je continue de croire en mon utilité. Les preuves d'un talent existent. Chacun d'entre nous a une panoplie de talents. Accepter le mépris, sans en tirer conséquence sur sa propre valeur, demeure un défi intérieur à transcender. Cet exercice intime peut trouver soutien dans des sagesses exprimées dans l'histoire. Un puissant oublie souvent que son statut est passager, que le temps vient où tout cela pourra changer. Dois-je lister l'abondance de déconfitures de grands leaders conjuguant avec maestria condescendance, complexe de supériorité, domination voire agressivité.
Quand nos histoires croisent ces situations blessantes, relisons la Fontaine...en pensant que nous jouons peut-être l'un ou l'autre des rôles si subtilement peints par le poête.
- Jean de LA FONTAINE (1621-1695)
Il faut, autant qu'on peut, obliger tout le monde :
On a souvent besoin d'un plus petit que soi.
De cette vérité deux Fables feront foi,
Tant la chose en preuves abonde.
Entre les pattes d'un Lion
Un Rat sortit de terre assez à l'étourdie.
Le Roi des animaux, en cette occasion,
Montra ce qu'il était, et lui donna la vie.
Ce bienfait ne fut pas perdu.
Quelqu'un aurait-il jamais cru
Qu'un Lion d'un Rat eût affaire ?
Cependant il advint qu'au sortir des forêts
Ce Lion fut pris dans des rets,
Dont ses rugissements ne le purent défaire.
Sire Rat accourut, et fit tant par ses dents
Qu'une maille rongée emporta tout l'ouvrage.
Patience et longueur de temps
Font plus que force ni que rage.